Homélie de Stanislas Lalanne pour le 7e dimanche de Pâques 24 mai 2020
Chers amis, à quelques heures de sa passion, dans une longue prière adressée à son Père, Jésus récapitule l’ensemble de sa vie. Comme s’il en faisait la relecture !
Il exprime ce qui a constitué le ressort profond et permanent de sa vie donné, de sa vie livrée : l’accomplissement de l’œuvre du Père.
Après l’écoute de cet évangile, je souhaite évoquer avec vous un mot, souvent mal compris, et une expression prononcés par Jésus dès sa première phrase :
• le mot « gloire »,
• l’expression « la vie éternelle ».
D’abord le mot gloire. C’est le dernier soir de Jésus, quelques heures donc avant sa mort sur la croix des criminels. Et il prie : « Père, glorifie ton Fils afin que ton Fils te glorifie. »
Surprenante gloire de Dieu ! En hébreu, la gloire, c’est le poids. Poids d’une vie qui tient face aux puissances de mort et de vanité.
C’est sur le visage de l’homme que resplendit la gloire de Dieu. On pourrait parler du visage humain, ce côté pile de la face de Dieu…
A Lyon, saint Irénée le proclamait déjà vers l’an 200. Ecoutez-le : « La gloire de Dieu, c’est l’homme vivant, et la vie de l’homme, c’est de voir Dieu. » Magnifique ! L’homme vivant, libre de voir Dieu et de l’aimer en tout frère humain.
Au cœur de nos détresses, Dieu offre la gloire de sa vie pour nous rendre vivants et pour qu’à notre tour nous fassions vivre les autres.
Vivre, c’est mystérieusement traverser la souffrance. Non pas la rechercher, mais l’affronter, car les pouvoirs de mort attaquent jalousement la vie que Dieu donne.
Au rejeté et au méprisé, au malade et au pécheur, Jésus redonne son poids de vie et d’éternité, lui faisant partager sa palme de mort et de résurrection.
La gloire de Dieu, c’est son poids d’amour qui nous fait vivre ! Les anges de Noël nous le rappellent : « Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes qu’il aime. »
Evoquons maintenant « la vie éternelle ». A vrai dire, on n’en parle pas beaucoup. C’est une expression qui revient souvent dans la catéchèse, la prédication…
Frères et sœurs, vous qui m’écoutez, êtes-vous déjà entrés dans la vie éternelle ? Vous allez probablement me répondre que non, en pensant que, sinon, vous ne seriez pas là à m’écouter !
Et pourtant ! Ecoutez la définition qu’en donne Jésus : « La vie éternelle, c’est qu’ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus Christ. »
Apprendre à connaître Dieu et le Christ, c’est la démarche de la foi, un chemin toujours à parcourir. Si la vie éternelle, c’est connaître Dieu, alors serions-nous déjà tous entrés dans la vie éternelle ?
La tradition chrétienne évoque le baptême comme « le bain de la nouvelle naissance », l’entrée dans une vie nouvelle. C’est ce à quoi vous aspirez, vous les catéchumènes qui m’écoutez. Bientôt vous serez plongés dans ce bain de la nouvelle naissance. Je m’en réjouis tellement avec vous.
Une nouvelle naissance qui, déjà, nous fait goûter la joie de la vie éternelle, même si nous n’y entrons pas encore pleinement.
A toutes les époques, dans toutes les traditions religieuses, l’être humain est habité par ce désir d’éternité, qu’il recherche profondément et dont il aimerait comprendre le sens.
Pour les chrétiens, la joie de la vie éternelle, c’est de connaître le Christ qui nous donne à voir le Père. Et c’est une connaissance relationnelle, pas une connaissance théorique.
On ne connaît vraiment les gens que quand on passe du temps avec eux, quand on apprend à découvrir petit à petit leur caractère, ce qui les rend joyeux et ce qui les attriste. Je dirais même que c’est en aimant les gens qu’on les connaît le mieux, parce qu’on apprend à découvrir ce qui habite leur cœur.
La vie éternelle, c’est la relation à Dieu, une relation aimante, où on apprend à le connaître.
Quand deux amoureux se regardent les yeux dans les yeux, ils ont l’impression de sonder l’autre au plus profond. Et le temps s’arrête pour eux, rien n’existe plus autour d’eux.
Petit avant-goût de ce que doit être la vie éternelle ! La tradition biblique dit d’ailleurs qu’un jour, nous verrons Dieu face à face.
La vie éternelle est déjà née en nous, mais elle est encore comme une petite flamme fragile, qui risque de s’éteindre. Elle peut rester en nous comme une petite flamme vacillante, une vague lueur… Mais elle peut aussi devenir en nous « comme un feu dévorant ».
A nous d’entretenir cette flamme. Comment ? Il s’agit d’une relation, d’une amitié avec Dieu à faire grandir : tout ce qui nourrit notre intimité avec Dieu fait grandir cette flamme.
Je trouve très forte et très belle cette intimité avec le Père qui se ressent dans tous les mots de la prière du Christ : « Glorifie ton Fils afin que le Fils te glorifie… Tout ce qui est à moi est à toi, et ce qui est à toi est à moi. » Jésus est celui qui connaît vraiment le Père parce qu’il vit pleinement de son amour.
« L’heure est venue », dit Jésus. L’heure de connaître Dieu. Trop souvent, nous croyons que cette heure sera celle de notre mort. Mais non ! La vie éternelle est déjà commencée.
L’heure est venue. Et c’est maintenant, d’accueillir ce que Jésus nous partage : « J’ai manifesté ton nom aux hommes, […] je leur ai donné les paroles que tu m’avais données », dit-il dans sa prière à son Père.
Oui, Jésus nous fait connaître Dieu, « le seul vrai Dieu ».
Notre monde nous propose tant d’idoles qui se nourrissent de l’argent, du désir de consommer ou de s’échapper, tant de fausses images de Dieu véhiculées par la haine et les fondamentalismes.
Ne nous laissons pas leurrer ! L’heure est venue de connaître le vrai Dieu. Et cette heure a déjà pour nous un goût d’éternité, car elle se nourrit de la relation d’amitié avec Dieu. Amen !
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