HOMÉLIE DU DIMANCHE 8 NOVEMBRE 2020 Par Mgr Stanislas Lalanne, evêque de Pontoise
L’évangile de ce jour se termine par un appel à la vigilance. « Veillez, dit Jésus, car vous ne connaissez ni le jour ni l’heure. »
C’est vrai, nous sommes dans une société où la vigilance est le maître-mot. La vigilance est vue prioritairement comme la prévoyance et la protection face à un danger…
Nous subissons douloureusement ces horribles actes de terrorisme de ces derniers jours, et nous sommes appelés à une grande vigilance. Tout le monde est sur le pont : police, gendarmerie, militaires de l’opération Sentinelle…
Et face à la deuxième vague de la pandémie, on est très attentif à toutes les mesures de précaution, les gestes barrière... Et on est appelé également à la vigilance et astreints au confinement.
C’est bien sûr essentiel de prendre soin des autres et de soi-même ! Et pourtant c’est dans une toute autre direction que nous conduit l’Evangile.
Celui-ci nous demande d’être vigilants, c’est-à-dire attentifs, mais à la venue du Seigneur dans le monde et dans nos vies.
En effet, l’époux qui vient, c’est le Christ, l’époux de son Eglise. Il est celui qui est venu, qui reviendra à la fin des temps – et nul n’en sait ni le jour ni l’heure – mais il est aussi celui qui vient aujourd’hui dans notre vie.
Avouons que nous sommes parfois assoupis, endormis, pris par la vie, affairés à mille choses et nous n’entendons pas le Seigneur venir.
Ou encore, nous n’arrivons pas à croire qu’il est présent, avec parfois un sentiment d’abandon devant son silence !
La vigilance, au contraire, est une attention, une présence, une qualité du regard, de l’écoute et du cœur. C’est d’ailleurs la même vigilance qui peut s’exercer vis-à-vis de Dieu, des autres et de soi-même.
Ainsi, ne pas être vigilant,
- c’est être aveugle sur ce Dieu qui frappe à la porte de notre cœur, parfois de manière imprévue ;
- c’est passer à côté des autres sans vraiment les voir ni être attentif à ce qu’ils souhaitent nous dire ;
- c’est vivre à la surface de soi et ne jamais se retrouver soi-même.
Alors, quel est le secret de la vigilance ? Quel est le secret de cette attitude qui nous permet d’avoir nos lampes allumées pour accueillir l’époux quand il vient, comme ces cinq jeunes filles prévoyantes ?
D’abord, savoir s’arrêter, souffler, échapper au stress, se recueillir au sens premier du terme, c’est-à-dire se ressaisir intimement. Le confinement permet ce recueillement, peut-être plus que le rythme de vie habituel…
Mais, surtout, habiter sa propre vie, garder sa lampe allumée, alimenter sa flamme, veiller à une certaine qualité d’intériorité spirituelle.
Le témoignage que notre Eglise est appelée à rendre au cœur de notre société, c’est que le Seigneur vient au moment où on ne l’attend pas et d’une façon que nous ne pouvons pas prévoir. Comme les vierges sages, notre Eglise attend sa manifestation avec confiance.
Quelle attitude nous est suggérée par cette parabole ? Quelle est la sagesse qui nous donne des réserves d’huile nécessaires pour accueillir le Christ quand il vient ?
La conclusion de la parabole nous en livre la clé : « Veillez donc car vous ne savez ni le jour ni l’heure. »
Il ne s’agit pas seulement de comprendre que, pour chacun, la rencontre définitive est imprévisible et que nous pouvons mourir à tout moment. C’est vrai ! Et cette crise sanitaire nous le rappelle avec force.
Mais il s’agit aussi de comprendre que Dieu vient toujours dans l’histoire des hommes comme à l’improviste.
Alors, sommes-nous attentifs à percevoir sa présence au cœur de l’histoire des hommes, et tout particulièrement tout près de chez nous ?
Tant de chrétiens vivent aujourd’hui comme si le Christ était une histoire ancienne à laquelle nous n’aurions plus accès ! Jésus serait une sorte de sage fondateur aux écrits duquel on se réfère, mais qui reste fixé à jamais dans les profondeurs de l’histoire. Tant de chrétiens n’attendent plus rien de sa venue, ni à la fin des temps, ni aujourd’hui !
Chers amis, nous sommes envoyés pour porter ce témoignage d’espérance au cœur des incertitudes et des angoisses de nos proches.
Nous croyons que Jésus est vivant aujourd’hui, que chaque fois que nous nous réunissons en son nom, il est au milieu de nous.
Nous croyons qu’il parle au nom de son Père et que sa Parole est lumière pour conduire nos existences.
Nous croyons que les événements que nous vivons sont le terreau où il manifeste sa présence et où il nous appelle à le rencontrer.
Nous croyons que nous pouvons apporter le témoignage de sa présence en ce monde par notre manière de vivre notre existence humaine.
Nous proclamons qu’il est vivant quand la charité nous fait sortir de notre tranquillité pour nous mettre au service des plus pauvres.
Dans ces temps où beaucoup se laissent saisir par la panique et l’angoisse en voyant s’écrouler un univers de sécurité, notre manière de nous tenir prêts à reconnaître l’Epoux qui vient, c’est notre sérénité et notre engagement au service de tous.
Finalement, cet Evangile nous pousse à être :
- une Eglise vigilante à se garder contre toute logique d’enfermement,
- une Eglise ouverte aux questions que posent notre temps et notre monde, sans en avoir peur,
- une Eglise qui témoigne de l’Evangile au-delà du cercle des convaincus,
- une Eglise qui trouve sa vérité non pas dans ce qu’elle possède mais dans ce qu’elle donne,
Que Dieu fasse fructifier tout ce qu’il a répandu en vous. Qu’il fasse fructifier la parole reçue du Christ.
Alors, je vous lance un appel : que l’Evangile soit vraiment une bonne nouvelle qui enthousiasme et transforme sans cesse votre existence. Amen.
+ Stanislas LALANNE
Evêque de Pontoise
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